samedi 13 février 2010

Incident diplomatique à Vancouver

L'heure n'était pas à la fête ce matin, lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques d'hiver, mais plutôt à l'émotion.
Hier, lors de la deuxième séance d'entraînement, le lugeur géorgien, Nodar Kumaritachvili, a en effet, été victime d'une sortie de piste mortelle alors qu'il se trouvait à la sortie du virage n°16 de cette descente la plus rapide au monde.
Les images sont terribles et ne sont pas sans rappeler l'accident de la Princesse Lady Di sous le pont de l'Alma, à Paris. Toutes les télévisions se sont ainsi relayés pour montrer (et remontrer) ce jeune homme de 21 ans s'enrouler autour d'un des pylônes soutenant le toit de la piste.

Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui dénoncent la dangerosité de cette piste, pourtant considérée comme un joyau de technologie. Un an plus tôt, lors d'un tournoi pré-olympique, certains s'étaient déjà indignés des vitesses inquiétantes (150 km/h) générées par le profil de cette descente.
D'autres évoquent tout simplement une "regrettable erreur de pilotage".

La gestion de l'affaire se trouve être une pente savonneuse pour les organisateurs des JO

Pourtant, ce matin, le gouvernement géorgien, jugeant ces explications farfelues, a demandé une enquête afin d'élucider cette tragédie. Selon un proche de la famille du défunt, le président géorgien, Mikheil Saakachvili, redoute "que les russes soient derrière cet accident". Le ministre des sports géorgien n'hésitait pas, quant à lui, à parler de "meurtre".
En effet, plusieurs indices laissent présager à la thèse de l'assassinat. Les images démontrent en effet la perte d'une pièce de la luge, contraignant vraisemblablement le pauvre lugeur à la perte de sa machine. Richard Coffin, en repérage pour France Télévision, a constaté sur la luge "des craquements, c'était horrible".

Relevant certains dysfonctionnements sur leur luge, les lugeurs géorgiens avaient menacé de ne pas prendre part à cette séance d'entraînement. L'organisation avait pris ces menaces au sérieux, promettant alors une révision complète des machines le jour des épreuves officielles. Malgré ce signe, l'entraîneur géorgien regrettait ouvertement que chaque délégation ne puisse avoir avec elle des responsables de l'entretien des luges : "les skieurs ont leurs farteurs alors que nous, nous sommes livrés à la merci d'une personne que nous ne connaissons pas".

"Moi, je ne comprends pas. Personne n'a jamais accusé mon farteur d'être le responsable de mes chutes."

Dorénavant, tous les regards se portent sur celui qui avait en charge l'entretien des luges de toutes les délégations. Selon la presse canadienne, ce dernier serait un ancien champion de skeleton, le russe Ygor Todorov. Si de lourds soupçons portent sur lui, c'est que son passé laisse pantois. Ayant oeuvré pour l'armée russe lors de la guerre en Tchétchénie, Todorov s'était reconverti dans les années 90, s'adonnant à sa passion pour les sports de glisse et notamment le skeleton où il était devenu en 1995 champion de Sibérie. En 1999, ses compétences en mécanique lui avaient permis d'avoir le poste de responsable de l'entretien des luges et bobsleighs auprès du CIO. Si son travail a toujours été irréprochable, comme aime le rappeler Jacques Rogge, son passé semble toutefois le rattraper.

Le défilé de la délégation russe avec ici son porte drapeau

Pour autant, de telles accusations ont mis le premier ministre russe, Vladimir Poutine, dans une colère noire, promettant ainsi, des représailles envers tous ces accusateurs. Une fois de plus, la Géorgie s'apprête donc à revoir les chars russes dans les rues de la capitale Tbilissi.
Deux ans après le conflit russo-géorgien, certains voient dans cette disparition tragique une stratégie de la part de Moscou. En somme, afin de laver le peuple russe de ces accusations (fondées ?), l'armée irait une nouvelle fois punir l'arrogance géorgienne.

En guise de conclusion, cette affaire tragique semble à nouveau plonger les Jeux Olympiques dans ses heures les plus sombres de son histoire. Après avoir été la vitrine de la propagande hithlérienne en 1936, après avoir été le terrain en 1980 et 1984 de la guerre froide (rappelons-nous que les américains n'étaient pas présents à Moscou et à contrario, les soviétiques étaient absents de Jeux de Los Angeles) ou après avoir cautionné en 2008, la politique chinoise face aux libertés individuelles et aux tibétins, les JO semblent être, une nouvelle fois, le théâtre d'enjeux politico-économiques. Théâtre qui, à coup sûr, permettra aux grandes puissances du monde d'affirmer son hégémonie grâce aux médailles glanées.

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