mercredi 1 avril 2009

Didier Lombard, un patron en otage.

Entre la Ligue de football et Orange, le torchon brûle

Après les dirigeants de Caterpillar, le directeur de l'usine pharmaceutique 3M et le PDG de PPR, François-Henri Pinault, c'est au tour du président de Orange, Didier Lombard, de "voir sa liberté entravée" (expression chère au JDD). Ce midi, alors qu'il s'apprêtait à déjeuner dans une grande brasserie parisienne, l'ex-pdg de France Télécom a en effet été contraint de rester dans ses bureaux.

Depuis plusieurs semaines, Orange vit des heures difficiles. Depuis le dépôt d'une plainte de Free et SFR, l'opérateur se doit de suspendre la commercialisation d'Orange Sport, sa chaîne payante, dédiée au sport. Devant un tel affront, les syndicats craignaient des licenciements "secs et violents". Les présidents des clubs du championnats de France de football laissaient entendre, quant à eux, que ce rendu de justice aurait des "conséquences financières catastrophiques pour les clubs". En effet, après avoir obtenu auprès de la LFP, la retransmission du match de ligue 1 du samedi soir, pour plus de 203 millions d'euros, Orange aurait décidé de ne pas verser cet argent.
Les mobiles pour une séquestration de Didier Lombard ne manquaient donc pas. Pour autant, lors de l'annonce de la prise d'otage, les journalistes s'accordaient à penser que les salariés du groupe étaient les seuls responsables de cette manigance.

"Il est inacceptable de séquestrer des patrons. Ces salariés n'ont aucune sensibilité".

Pourtant, contrairement aux a-priori et aux préjugés, cette prise d'otage n'a rien d'ordinaire. Selon le service de sécurité de l'immeuble, c'est d'ailleurs ce qui a permis aux hommes de s'introduire dans les locaux aussi facilement. Bernard Dutilleuil, vigile depuis près de 6 ans, n'en revenait toujours pas : "ils étaient en costume et puis, on les voit régulièrement à la télé. Alors j'ai cru qu'ils venaient en toute courtoisie. Sur TF1, ils nous ont laissé croire que ceux qui manifestent leur mécontentement sont sales et syndiqués. Mes bras m'en tombent". Cette déclaration permet alors d'identifier les responsables de cette nouvelle prise d'otage. Christiane Buché, standardiste intérimaire depuis 8 ans confirmait vers 16 heures les doutes enfin émis par les médias. "J'en ai reconnu plusieurs. Il y avait celui qui ronchonne tout le temps, vous savez, celui qui croit toujours au complot contre son équipe. euh. (elle réfléchit). Ca y'est. Jean Michel Aulas. Et puis l'autre, je le connaît. Il ressemble comme deux goûtes d'eau à mon beau-frère. C'est Pape Diouf. Les autres, je ne les connaissait pas. Mais ils étaient nombreux".

"C'est pas moi qui ai eu l'idée, c'est Diouf".

Il ne fait donc plus de doute que l'instigateur de cette opération est l'UCPF (syndicats des présidents de clubs). Jean Pierre Louvel, président du syndicat et du club doyen du Havre, laissait envisager, dans un communiqué, une issue heureuse pour Bertrand Bompard : "J'ai bon espoir que la raison l'emporte et que tout ne soit pas détruit aujourd'hui". Nous imaginons donc que cette affaire verra une fin heureuse lorsque Orange versera les 203 millions d'euros à la ligue. Frédéric Thiriez, président de cette ligue de football envisageait quant à lui un endettement de 90% des clubs professionnels dans le cas du non paiement de l'opérateur. Nous comprenons donc que les clubs français aient un intérêt tout particulier à récupérer cet argent. En effet, en quête de reconnaissance sur la scène européenne, les instances du football français savent que l'argent des droits de télé constituent une manne financière extrêmement importante dans les budgets des clubs.

La France se trouve extrêmement dépendante de l'argent des droits de TV. 57%, ça fait peur.

Par conséquent, le football français se trouve pris au piège d'un jeu médiatico-financier dont il a pourtant fixé les règles. La tourmente judiciaire dont est victime Orange conjuguée à l'image perpétuellement discréditée du championnat de France permettent malgré tout à un acteur de sortir gagnant. Ainsi, Canal+, avec sa proposition de 405 millions d'euros avait fait considérablement chuter les droits de retransmissions du championnat; l'offre de Orange sauvant les meubles pour la LFP. Il est donc évident que le retrait de Orange sonnerait alors comme l'hégémonie de la chaîne cryptée sur le football français.

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